C’est l’aube, et le ciel est encore une fois bien sombre… Wraaroon ouvre doucement les yeux. L’air frais et humide du sous-bois apaise rapidement son état de torpeur. Cette nième nuit passée à dormir en pleine nature avait quelque peu fait délirer le personnage, peut-être la fièvre, ou un mal quelconque fauché à un animal sauvage ou du à une mauvaise plante ingérée… Cela fait plusieurs semaines qu’il ère, solitaire – ou presque –, à travers les plaines et les montagnes. Aujourd’hui, il vagabonde dans ce bois, et à décidé d’interrompre son périple en bordure d’un petit village isolé.
En définitive, il est arrivé ici guidé par les récits des voyageurs et autres aubergistes en tout genre. Ceci dit, Wraaroon ne se sent pas l’âme d’un aventurier… et en tant que narrateur, je soulève ici deux points intéressants : le premier étant « qu’il ne se sent pas l’âme d’un aventurier », car en effet il faut insister sur la formulation. Considérons que chaque individu est, plus ou moins, sensé avoir une idée précise de son schéma corporel (ie ses capacités physiques), la récente amnésie de notre personnage tend à justifier cette errance globale et légitime (ie aussi bien physique, que spirituelle, ou encore cartographique). La seconde étant que Wraaroon n’est certainement pas un homme d’action, tout du moins il ne se considère pas comme un aventurier ; car si je disais tout à l’heure qu’il s’était trouvé pour vocation d’écouter les récits fantaisistes et rocambolesques des ivrognes d’auberges de passe, c’était précisément dans un souci d’évitement de ces destinations farfelues (car oui, un ivrogne n’y met pas la forme, mais peut y mettre le fond !).
Soit dit en passant, il semble nécessaire de lever un voile qui persiste sur ce personnage : son nom. Ne provenant pas véritablement de sa propre imagination, on peut dire qu’il se l’est légitimement approprié. C’est une charmante jeune nordique (je vous laisse le soin de vous faire votre propre représentation du spécimen) qui est à l’origine de ce « Wraaroon ». Elle fut la rencontre d’un soir dans une taverne (son deuxième soir amnésique pour être précis). Notre « héros », prit au dépourvu au moment des présentations, n’a su donner qu’un écho mal articulé d’une violente apostrophe lancée du fond de la salle par on se qui, envers on ne sait quoi… Toujours est-il que la demoiselle semblait apprécier la sonorité marquée de ce nom et n’a cessé de le scandait de toute la soirée, il était devenu le terme de ponctuation de chaque phrase. N’eut-elle d’ailleurs connu que ce « mot » en français (qu’elle croyait français)? Le reste du discours était probablement le résultat d’un mélange drastique entre le nordique radical, et le nordique moyen, mais l’intonation qu’elle employait sur le « WrAArOOn » émut tellement notre ami, qu’il ne pu détourner son attention de la jeune fille de toute la nuit. Malheureusement la rencontre fut éphémère puisque sa camarade devait repartir vers le nord dès le lendemain, il en conclu qu’elle allait retrouver sa terre natale. Elle lui laissa tout de même un présent avant son départ, un tout jeune chat tigré, elle dut détecter une souffrance affective, il le nomma Sam.
Revenons-en à notre histoire d’aventurier… Ou plutôt de « non-aventurier », et je pourrais m’empresser par ailleurs de rajouter que Wraaroon n’avait pas non plus l’intime conviction d’appartenir au groupe « pilier-de-bar ». Il est évident qu’après 3 jours dans cette taverne, le modèle de l’alcoolique moyen était parfaitement assimilé, néanmoins notre personnage avait du mal à s’imaginer « ex-ivrogne » en témoignait la difficulté qu’il avait à rivaliser durablement avec ce genre d’énergumènes. N’étant pas plus attiré par le travail manuel, il finit par en déduire qu’il avait du être Magicien, Sage ou même Chaman, il s’imaginait fort bien exercer une activité noble, et on peut dire que son caractère histrionique concordait avec le rôle qu’il se donnait à voir. Cet élan de plénitude le poussa à organiser son départ, décidé à retrouver ses racines, et ainsi entreprendre un vaste travail de remémoration.
Ces bases étant posées, reprenons la situation actuelle de notre personnage si vous le voulez bien, qui depuis 2 semaines, n’a croisé ni voyageur, ni tavernier. On peut facilement deviner de l’euphorie du départ est maintenant retombée… la lutte contre le nature devient de plus en plus dure au fur et à mesure que les jours passent. Les réserves de nourriture sont vides, et la nutrition exclusive de champignons et de plantes sauvage entament les capacités motrices des nos amis (en effet n’oublions pas Sam).
L’air frais et humide du sous-bois rappelle vaguement quelque chose à Wraaroon, sans doute l’atmosphère nordique qu’il a côtoyée au début de son périple. Il ouvre les yeux lentement et aperçoit Sam dormant près des cendres encore fumantes. La nuit était agitée, un cauchemar a frappé l’esprit de notre personnage, il capture quelques détails avant que le rêve ne s’efface pour de bon, et enfin, se réveil complètement. L’angoisse est bien présente, la conclusion étant qu’il faut impérativement se rendre dans ce village quoi qu’il en soit. L’idée de devoir faire de nouvelles rencontres l’inquiète, il ne peut pas s’empêcher de revoir et d’imaginer cette désolation masculine sur-enivrée, totalement incontrôlable au comptoir de la taverne, comme s’il s’agissait d’une fatalité quel que soit le village visité. Ces individus là, Wraaroon les connaissait par cœur, et ce ne sont pas ces personnes là qu’il recherche. De surcroit, une atmosphère de misère et de désolation semble planer au dessus du village, les maisonnettes de terre et de chaume mal agencées témoignent d’une organisation vétuste. On observe tout de même une structure ornementale, trônant au milieu de la place, un bucher monumental qui impose sa puissance de par une fabuleuse aura pyrique. Wraaroon comprend : « c’est donc comme ça qu’on règle la discorde dans ce village… ». Un lieu semblait se différencier des autres, l’auberge (assimilée comme telle grâce à la plaque oscillante et grinçante au dessus de l’entrée, une large pinte y était taillée, assez large pour la distinguée de loin…), qui semblait à elle seule rassembler toute l’agitation du village. Depuis deux nuits de campement en lisière du bois, aucune caravane marchande n’a été aperçue aux alentours du village, de même personne n’en était sorti ni rentré par la voie principale. L’esprit de Wraaroon étant encore assez vif pour effectuer des connexions historiques, il se souvient de ces mystérieux récits sur des villages hantés, sur lesquels se sont abattues de terribles malédictions, et qui aujourd’hui vivent dans le désespoir, ne sachant comment chasser le mauvais œil. Soit. Mais ces discours, notre ami n’y a jamais vraiment porté attention, pas plus qu’à ces affaires de religion par ailleurs, depuis son amnésie, toutes ces histoires n’avaient de sens, selon lui, qu’aux yeux de certains fous ou illuminés.
Le réveil avait fort bien commencé, et ce n’est pas le moment de se torturer l’esprit avec ces histoires ! Il est tant d’aller rendre visite à ces villageois, quels qu’ils soient, autant qu’il est impératif de manger un repas chaud et de rétablir un contact humain. Wraaroon empoigne sa sacoche, la renvoie dans son dos, et d’un pas décidé se dirige vers le village en bas de la colline. Arrivé sur le chemin de terre boueuse, il prend la direction de l’auberge dont on distingue de maigres éclats lumineux se dessiner en transparence sur les carreaux. En se rapprochant, il remarque que la cheminée commence tout juste à fumer, une fine odeur de cuisson émoustille les narines de notre compagnon qui conçoit qu’au final cette halte pourrait s’avérer forte agréable ! Il arrive finalement au pas de la porte, suivi de près par son petit camarade. Il lève les yeux une dernière fois vers la colline, discerne vaguement les vestiges de son camp, et déclenche une longue inspiration. Il se retourne vers la large porte de cette auberge, il finit par la pousser et pénètre dans la salle commune, envahit par le grave pincement des gonds.
[hrp] La suite dans l’auberge, je fais le plus vite possible ! =) [hrp]
Jeu 16 Oct - 21:23
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